
Jusqu’ici enclavé et largement ignoré des grands projets économiques, le département de Doropo, situé à la frontière burkinabè, se retrouve propulsé sur le devant de la scène. Un gisement aurifère de plus de 100 tonnes y a été identifié, bouleversant les équilibres du secteur minier en Afrique de l’Ouest.
Cette découverte exceptionnelle, équivalente à près de 3 millions d’onces d’or, renforce le positionnement stratégique de la Côte d’Ivoire parmi les producteurs d’or les plus dynamiques du continent. Dans une région où plus de 70 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, l’enjeu dépasse largement la sphère industrielle.
Une mine de rang international en gestation
Classé parmi les plus prometteurs d’Afrique ces dernières années, le gisement de Doropo devrait donner naissance à une mine d’envergure. Le lancement des travaux est prévu pour 2026, avec une phase de construction de deux ans. L’ampleur du chantier nécessitera un important déploiement d’engins, de main-d’œuvre spécialisée et d’infrastructures adaptées.
Les autorités visent une exploitation comparable à celles des grandes régions minières du Ghana ou de la RDC, symboles d’industrialisation rapide autour des ressources naturelles.
Un projet à plus de 450 millions d’euros
Pour soutenir cette ambition, un investissement colossal de 300 milliards de francs CFA (environ 457 millions d’euros) a été engagé. Ce financement permettra de faire de Doropo un site pilote, tant sur le plan technologique que sur celui de la gouvernance.
Les retombées économiques sont déjà estimées à la hauteur de l’investissement. L’exploitation du gisement pourrait générer autant en recettes fiscales pour l’État, offrant ainsi des marges budgétaires inédites pour développer la région.
Un levier pour le développement local
Au-delà des chiffres, le projet minier représente une opportunité majeure pour le tissu social local. Près de 3 000 emplois directs devraient être créés, sans compter les nombreux effets d’entraînement sur les secteurs de la logistique, du commerce et des services.
Des infrastructures sociales sont également envisagées : réhabilitation d’hôpitaux, modernisation des écoles, extension du réseau routier… L’État promet d’associer les populations aux prises de décisions et de faire de ce projet un catalyseur de progrès partagé.
Des inquiétudes légitimes autour de l’impact environnemental et social
Mais la ruée vers l’or ne va pas sans risques. Plusieurs ONG alertent déjà sur les tensions foncières potentielles et les précédents d’expropriations mal gérées dans d’autres régions. Elles réclament des mécanismes transparents de compensation et de concertation avec les communautés locales.
Sur le plan écologique, les dangers sont bien identifiés : pollution des nappes phréatiques, déforestation, érosion des sols… Les autorités affirment vouloir appliquer des normes environnementales strictes, mais la méfiance reste vive parmi les acteurs de la société civile.
L’or, moteur d’une ambition régionale
Avec 55 tonnes produites en 2023, la Côte d’Ivoire a déjà démontré sa capacité à s’imposer comme un acteur clé du secteur aurifère. Le projet Doropo s’inscrit dans une dynamique continentale où l’Afrique de l’Ouest attire une part croissante des investissements miniers mondiaux.
L’ambition ivoirienne ne se limite plus à l’extraction brute : le pays entend développer sa capacité de transformation locale, en s’appuyant sur des partenariats technologiques internationaux.
Une carte géopolitique qui se redessine
Avec ce nouveau gisement, la Côte d’Ivoire franchit un cap. Doropo pourrait s’inscrire à terme dans les circuits mondiaux d’approvisionnement en or, renforçant le poids géostratégique du pays dans la région et au-delà.
Outre les gains économiques, cette montée en puissance vise aussi à stabiliser les zones sensibles, freiner l’orpaillage clandestin, réduire les migrations internes, et structurer un tissu économique durable.
La découverte du gisement de Doropo marque un tournant pour la Côte d’Ivoire. À la croisée de l’ambition économique, du développement social et des impératifs environnementaux, ce projet minier trace une trajectoire nouvelle pour un territoire longtemps délaissé. Entre promesses et prudence, le pays avance avec l’or comme levier de transformation.







